Charonne, semaine 13

Secret défense, j’en ai déjà par­lé. Je vais donc com­men­cer avec le mil­liar­daire le plus célèbre de la bande des­si­née récente : Lar­go Wincz­lav, dit Lar­go Winch. On connaît l’his­toire, racon­tée avec diverses varia­tions en romans, en BD et en série télé avant de se retrou­ver au cinoche : Lar­go, jeune globe-trot­ter doté d’un carac­tère le pous­sant plus à fon­cer qu’à se poser pour réflé­chir, se retrouve avec l’hé­ri­tage du plus gros groupe finan­cier de la pla­nète sur les épaules, et doit s’im­po­ser face aux action­naires prin­ci­paux pour pro­fi­ter de son bien. Un peu léger, mais ça fait un film d’ac­tion potable, qui tourne bien et qui ne fatigue pas trop les neu­rones — enfin, sauf bien sûr si vous essayez de suivre les évé­ne­ments sur le plan de la finance internationale.

Le bon, la brute, le cin­glé est, comme son nom l’in­dique, un wes­tern… kim­chi. C’est donc un hom­mage au wes­tern, mais aus­si et sur­tout au wes­tern spa­ghet­ti, dont on reprend les recettes gra­phiques (larges pay­sages alter­nant avec des plans ser­rés), nar­ra­tives (un tré­sor per­du, une brute très bru­tale, un cin­glé très cin­glé et un bon pas bon du tout), ryth­miques (des séances d’ac­tion longues ou courtes, mais tou­jours rapides, entre­cou­pées de pré­li­mi­naires assez contem­pla­tifs) et musi­caux (un thème récur­rent pour le per­son­nage prin­ci­pal). Et plus encore qu’au spa­ghet­ti en géné­ral ou à Il était une fois la révo­lu­tion (dont on reprend plu­sieurs scènes et la ques­tion de l’in­dé­pen­dance poli­tique de la nation), c’est au chef-d’œuvre de Ser­gio Leone, Le bon, la brute et le truand, que l’on rend ici hom­mage, avec cepen­dant cette varia­tion pas inin­té­res­sante : si East­wood et, donc, Blon­din (le bon, enfin, si l’on peut dire) était le per­son­nage cen­tral chez les ritals des 70’s, c’est ici plu­tôt Chi­co, par­don, le cin­glé (Song Kang-Ho) qui enva­hit le pre­mier plan.

Pas facile donc d’é­mettre un avis tran­ché sur cette œuvre, nour­rie de réfé­rences au moins autant que d’i­dées ori­gi­nales. Ça res­semble à du spa­ghet­ti, ce qui dans ma bouche est loin d’être une insulte, et ça reprend même cer­taines fai­blesses du spa­ghet­ti : pré­vi­si­bi­li­té de cer­taines scènes, finaux lan­guis­sants et légè­re­té du scé­na­rio. Seule la sauce change, avec ici quelques trucs venus du ciné­ma asia­tique, en par­ti­cu­lier dans les cho­ré­gra­phies, qu’on retrouve chez Jackie Chan notam­ment. Bref, tout ama­teur de spa­ghet­ti doit s’empresser d’al­ler décou­vrir le wes­tern kim­chi, il pas­se­ra un bon moment et ne sera pas trop dépaysé.

Enfin, Maca­dam cow-boy, que le cinoche Le Cham­pol­lion, dans le Vè arron­dis­se­ment, a eu la bonne idée de reprendre et dont mes parents m’a­vaient beau­coup par­lé. L’his­toire d’un plon­geur péque­not du mid­west qui monte à New York, où il rêve de se faire entre­te­nir par des femmes riches (ou des hommes, peu importe) et d’a­voir la belle vie. Bien sûr, rien ne se passe comme pré­vu et il se retrouve dans un appar­te­ment condam­né pour insa­lu­bri­té avec un tuber­cu­leux boî­teux et ita­lien qui l’a arnaqué.

C’est très très très spé­cial, dif­fi­cile à clas­ser, et ça m’a énor­mé­ment rap­pe­lé Easy Rider, tour­né à la même époque (c’est peut-être pas un hasard). Construc­tion à flashes-backs mul­tiples, mise en pers­pec­tive sys­té­ma­tique des choix de vie et des trau­ma­tismes enfan­tins, c’est fina­le­ment un film très intel­lo et, en même temps, très rentre-dedans lors­qu’il s’a­git de démo­lir métho­di­que­ment le rêve amé­ri­cain — vous savez, ce pays où tout est pos­sible à qui a la volon­té et l’en­vie de réus­sir. À voir, sans nul doute, mais sou­vent un peu long — et côté méninges, il rat­trape sans pro­blème les deux précédents.

Sinon, on a chan­gé de relec­trice, ma voi­sine de bureau en avait trop marre de chas­ser la faute dans des trucs inin­té­res­sants. La nou­velle va faire plein de choses, y com­pris peut-être reprendre des piges, ce qui signi­fie que je vais sans doute faire un peu moins de news et de piges et un peu plus de tests. Par ailleurs, on a ren­con­tré des gens, disons, euh, inté­res­sés par la ren­ta­bi­li­té de l’en­tre­prise. Les­Nums va sans doute vivre une petite révo­lu­tion dans les pro­chains mois, Focus aus­si, faut voir com­ment ça va tour­ner mais ça devrait être inté­res­sant — en espé­rant que ce soit inté­res­sant dans le bon sens, pas comme quand je dis que c’est inté­res­sant ce qu’il se passe au par­ti socialiste.