Mary et Max

d’Adam Eliott, 2009, O

Discussion entre Adam et Melanie, dans un pub de Melbourne, vers 3 h du matin :

— Tu sais quoi ? Je connais un type, com­plè­te­ment à la masse. Il sup­porte pas le bruit, il peut pas sor­tir de chez lui, il sait à peine écrire mais il sait tout sur tout, il fait la même chose tous les jours de toutes les semaines…

— Nooon ?

— Si. Et même, il a peur des gens, parce que quand tu lui parles même avec un grand sou­rire, il sait jamais si tu l’en­gueules ou si t’es content.

— Y’a vrai­ment de ces tarés…

— Tu sais quoi ? On devrait en faire un film.

— Ah ouais, mais il fau­drait une his­toire… C’est pas mal ce truc de peur des gens et de rou­tines… Imagine que sa vie soit bou­le­ver­sée par l’ar­ri­vée de quelqu’un ?

— Pas pos­sible, il blo­que­rait à mort… Ou alors, non, je sais. Imagine une gamine moche et conne, que per­sonne aime parce que ses parents aus­si sont moches et cons, et qui écrit à une adresse au hasard dans l’an­nuaire et qui tombe chez lui.

— Ah ça, c’est pas mal. Il ferait une crise d’an­goisse de malade…

Voilà sans doute com­ment fut créé Mary et Max. Une mal­en­con­treuse cuite chez un jeune con de réa­li­sa­teur et une jeune conne de pro­duc­trice, qui débouche sur un des films les plus mal­sains que j’ai vus, dont je sais tou­jours pas si le but est de faire rire de l’an­thro­po­pho­bie — « ouah, trop fort, l’o­bèse qui panique parce qu’il reçoit une lettre, ah, ah, ah » —, d’at­ten­drir faci­le­ment avec des parias — « ooooh, c’est meu­gnon, un Asperger, j’en veux un pour mon anni­ver­saire » — de faire une para­bole sur le phé­no­mène オタク en le sor­tant pour une fois du Japon.

On me dira que je sur­réa­gis sans doute parce que j’ai par­fois du mal à inter­pré­ter les expres­sions et inten­tions de mes inter­lo­cu­teurs, parce que je me pas­sionne pour n’im­porte quoi, ou parce qu’il m’ar­rive de faire des crises d’an­goisse pour des évé­ne­ments que d’autres juge­raient anodins.

Possible, mais un film d’où je sors amer, en colère et anxieux, je peux décem­ment pas le conseiller.