The social network

de David Fincher, 2010, ***

C’est l’his­toire, vague­ment connue de tous ceux qui ont enten­du par­ler d’Internet, d’un nerd arri­viste qui par­vient à atti­rer l’at­ten­tion d’un club select de la fac de Harvard. Mais au lieu de déve­lop­per leur réseau social comme pré­vu, il part dans son coin avec son idée, qui devien­dra Facebook et fera de lui le plus jeune mil­liar­daire de la planète.

Film de pro­cès, un peu. Mais sur­tout film d’ob­ser­va­tion d’un geek semi-autiste à l’e­go déme­su­ré, inca­pable de par­ler aux autres êtres humains et en par­ti­cu­lier aux êtres humaines, fon­ciè­re­ment franc et par consé­quent tota­le­ment inadap­té en socié­té (c’est jamais bon de dire hon­nê­te­ment ce qu’on pense au moment où on le pense), mais doté d’une majo­ri­té des parts d’une entre­prise qui s’é­tend comme un virus et dont la valo­ri­sa­tion explose.

Le petit pro­blème, c’est que, au fond, on s’en fout. Zuckerberg est-il un génie incom­pris ou un impos­teur cynique ? Un sale con arro­gant ou un ado pau­mé ? Un Gordon Gekko ou un Sheldon Cooper ? Il y aurait sans doute matière à en faire des inter­ro­ga­tions inté­res­santes dans un cadre ciné­ma­to­gra­phique, mais Fincher se contente ici de dérou­ler l’his­toire, enfi­lant quelques cli­chés au pas­sage. La réa­li­sa­tion n’a rien du cise­lé à la ryth­mique irré­pro­chable d’un Fight club ou d’un Seven, on est loin de l’am­biance oppres­sante de Panic room ou Alien³, et The social net­work est sur­tout un enchaî­ne­ment par­fois non chro­no­lo­gique de scènes banales.

Restent tout de même quelques très bons points. Des acteurs irré­pro­chables, une vraie his­toire sans héros et sur­tout sans gen­til, une forme d’é­loge du cynisme qui apporte un contre­point à la conclu­sion de Fight club, et sur­tout, sur­tout !, des dia­logues extra­or­di­naires et un comique de situa­tion à froid qui glace mais fait sou­rire à coup sûr. The social net­work intègre quelques répliques et quelques scènes qui pour­raient bien res­ter et pas­ser dans la mémoire collective.

Au glo­bal, le film est donc plu­tôt agréable, et se laisse voir avec plai­sir, mais il lui manque une vraie his­toire de cinoche.