Terminator Genisys

d’Alan Taylor, 2015, ****

Comme tout le monde, vous vous êtes sans doute deman­dé un jour pour­quoi ni les humains ni les machines n’ont ren­voyé un sol­dat ou un ter­mi­na­tor avant 1984, afin d’empêcher les évé­ne­ments des quatre pre­miers films. Et bien, la réponse est simple : ceux-ci se déroulent dans une ligne tem­po­relle où le pre­mier ter­mi­na­tor est arri­vé en 1984, où Kyle Reese a débar­qué dans la fou­lée pour pro­té­ger Sarah Connor, et où la suite est connue. Mais il est effec­ti­ve­ment pos­sible d’en­voyer quel­qu’un plus tôt ; dans ce cas, c’est un uni­vers paral­lèle qui se crée à par­tir de cette bifur­ca­tion. Pour ce cin­quième opus, on passe dans un uni­vers où deux ter­mi­na­tors ont été envoyés dès les années 70 ; ain­si, lors­qu’il revient des années 2020 depuis la ligne tem­po­relle ini­tiale confor­mé­ment au pre­mier film, Kyle Reese débarque dans une ligne dif­fé­rente où il a la sur­prise de décou­vrir une Sarah Connor déjà entraî­née, armée et consciente de son futur, pro­té­gée par un T‑800 vieillissant.

La bifurcation : Sarah adolescente sauvée par un T-800. photo Paramount Pictures
La bifur­ca­tion : Sarah sau­vée par un T‑800 encore enfant, dans les années 70. pho­to Paramount Pictures

Donc là, déjà, vous l’a­vez com­pris : on retrouve les voyages tem­po­rels qui ont fait le charme de la série. En fait, tous ceux qui man­quaient dans Renaissance (qua­trième film de la série et seul à être entiè­re­ment post-apo­ca­lyp­tique) ont été injec­tés ici et il est par­fois un peu dif­fi­cile de suivre les évé­ne­ments pas­sés, pré­sents et futurs, en démê­lant ce qui vient de l’his­toire ori­gi­nelle et ce qui est né de la bifur­ca­tion des années 70.

L’intérêt ? Simple : Genisys reprend les trois pre­miers films, sans pour autant être pri­son­nier de leur his­toire. Il parle donc aux nos­tal­giques dans mon genre, tout en racon­tant une his­toire inédite où les rôles des dif­fé­rents per­son­nages évo­luent par­fois radi­ca­le­ment. C’est évi­dem­ment valable pour les humains, mais aus­si pour Skynet lui-même : simple réseau infor­ma­tique mili­taire dans l’u­ni­vers d’o­ri­gine, le voi­là sys­tème d’ex­ploi­ta­tion dis­tri­bué dans la nou­velle ver­sion. Réécrire l’u­ni­vers a ain­si per­mis de le confor­mer à notre actua­li­té afin de dépous­sié­rer l’his­toire. Au pas­sage, le scé­na­rio est éga­le­ment plus com­plexe et plus inté­res­sant que dans les pré­cé­dents volumes, mais ras­su­rez-vous, ça reste très loin de l’Introduction à la psy­cha­na­lyse.

C'est quand même Terminator, hein. Faut que ça pète. photo Paramount Pictures
C’est quand même Terminator, hein. Faut que ça pète. pho­to Paramount pictures

Le film lui-même est évi­dem­ment avant tout un film d’ac­tion, avec un peu de science-fic­tion dedans. Les effets spé­ciaux sont évi­dem­ment très réus­sis (on note­ra notam­ment le face-à-face entre le T‑800 tout neuf envoyé en 1984 et le T‑800 tout vieux qui est là depuis bien plus long­temps, qui rap­pelle évi­dem­ment les deux Jeff Bridges de Tron l’hé­ri­tage). Les acteurs sont évi­dem­ment inégaux, mais les auteurs ont eu l’in­tel­li­gence de jouer du côté mono­li­thique et inex­pres­sif d’Arnold pour faire pas­ser la pilule en dou­ceur. La réa­li­sa­tion est évi­dem­ment spec­ta­cu­laire, mais ne fait pas tou­jours dans le détail et n’é­vite évi­dem­ment pas quelques cli­chés écu­lés (la pro­chaine fois que je vois un bus sus­pen­du au Golden Gate, je crois que mon sou­pir s’en­ten­dra jus­qu’à Hollywood).

Au pas­sage, on peut noter que le compte à rebours final est res­pec­té : ça n’a l’air de rien, mais c’est agréable… et c’est un petit hom­mage à James Cameron, créa­teur de Terminator, qui s’é­tait fait remar­quer en pla­çant un compte à rebours par­fai­te­ment calé dans la der­nière séquence d’Aliens.

J'avais pas l'habitude de voir Daenerys en châtain, mais ça lui va bien aussi. Faut dire que c'est sa couleur naturelle (comme Arnold en blanc d'ailleurs). photo Paramount pictures
J’avais pas l’ha­bi­tude de voir Daenerys en châ­tain, mais ça lui va bien aus­si. Faut dire que c’est sa cou­leur natu­relle (comme Arnold en gris d’ailleurs). pho­to Paramount pictures

Dans l’en­semble, Genisys n’est donc pas un grand film, mais c’est un bon film d’ac­tion, pre­nant et plu­tôt réus­si, qui n’en fait pas trop dans le pseu­do-pathos et assume son côté bour­rin sans pour autant renon­cer à toute émo­tion. C’est en tout cas bien meilleur que Le sou­lè­ve­ment des machines et Renaissance.