Predators

de Nimrod Antal, 2010, ****

Notons en pré­am­bule que je dois faire par­tie des 22 per­sonnes sur cette pla­nète qui n’a­vaient jamais vu un film de la série des Predator, bien que celui-ci soit le cin­quième et mal­gré le sta­tut d’i­né­vi­table du pre­mier opus (celui où Schwarzenegger jouait le monstre¹).

Donc, pour moi, celui-ci sera le pre­mier. Et bon, ben, c’est un sur­vi­vor extrê­me­ment clas­sique, avec des gens qui essaient de sur­vivre à un enne­mi qu’il est vache­ment plus fort, à peu près invi­sible et plu­tôt insi­dieux. Ils crèvent les uns après les autres en enchaî­nant les inévi­tables figures de style : celui qui fuit le groupe pour ten­ter de s’en sor­tir seul et tombe dans un piège, celui qui se sacri­fie pour sau­ver les autres, celui qui défie le pré­da­teur en duel, tout ça. Jusqu’à la traî­trise pré-finale, orches­trée comme une évi­dence pour qui­conque a déjà vu un film du genre. Quant au cas­ting, il est tout aus­si habi­tuel, avec le colosse indes­truc­tible, le chat maigre façon légion­naire, le taré de ser­vice, la femelle qui va appor­ter une touche de dou­ceur dans ce monde de bru­tes², tout ça.

L’originalité, elle est dans les détails. Il y a là des pré­mices d’in­tros­pec­tion assez inha­bi­tuels, sans doute dus à deux fac­teurs : d’une part, le choix du cas­ting, avec un tau­lard dont on sait assez rapi­de­ment qu’il était là pour viol, un yaku­za, un gué­rillé­ro sud-amé­ri­cain, un géno­ci­daire afri­cain, un com­bat­tant du front tchét­chène, un mer­ce­naire ex-forces spé­ciales, un méde­cin inof­fen­sif, et une tireuse d’é­lite ; d’autre part, la réflexion de cette der­nière, qui va ser­vir de miroir à cer­tains — et notam­ment au per­son­nage prin­ci­pal, le mer­ce­naire amé­ri­cain — pour révé­ler leur part com­mune. Celle-ci n’est pas qu’ils sont com­bat­tants, plein de gens le sont et ça n’en fait pas des gibiers potables pour un chas­seur spor­tif (ai-je dit qu’ils étaient balan­cés sur une pla­nète ser­vant de chasse pri­vée à des extra-ter­restres ?). Leur spé­ci­fi­ci­té, c’est que ce sont tous eux-mêmes des pré­da­teurs, qui n’ont l’ins­tinct de fuite que le court ins­tant visant à évi­ter le coup et trou­ver un poste avan­ta­geux, d’où ils contre-attaquent parce que quand on a pris goût à la chasse, on y va même si on est là pour ser­vir de gibier. J’ai vu le nom d’un cer­tain Robert Rodriguez au géné­rique, c’est peut-être pas un hasard…

Bon, comme d’ha­bi­tude dans les films de ce genre, la réflexion ne va pas beau­coup plus loin ; mais elle existe, c’est déjà ça. L’homme n’est pas une inno­cente créa­ture tor­tu­rée par un enne­mi per­vers, c’est une salo­pe­rie comme les autres. Et d’ailleurs, l’acte le plus gen­til qu’on puisse faire pour quel­qu’un, c’est de lui tirer une balle dans le cœur.

Le reste, c’est une réa­li­sa­tion sans faille (un peu pol­luée par une musique par­fois enva­his­sante) qui s’en occupe : le film tourne comme un cou­cou suisse, les effets de manche sont habi­tuels mais réus­sis, bref, pour les ama­teurs du genre, c’est bonnard.

¹ Ou pas.

² Ou pas.