The town

de Ben Affleck, 2010, ****

J’ai pas l’ha­bi­tude d’être tendre avec Ben Affleck, qui a long­temps figu­ré en très bonne place sur ma liste noire des acteurs à fuir comme la peste. Aussi, il me faut le dire d’en­trée : ce mec est bon… der­rière la camé­ra. Bon, là, il s’est aus­si don­né le pre­mier rôle et, à son habi­tude, manque de finesse et de cha­risme pour vrai­ment empor­ter l’adhé­sion ; mais The town est for­te­ment réa­li­sé, avec une maî­trise indé­niable du rythme et de l’ambiance.

Le film a pour­tant une fai­blesse : c’est un polar à l’an­cienne, qui mêle habi­le­ment film de bra­quage, avec flics et bra­queurs qui se connaissent et se suivent depuis long­temps, et danse-hési­ta­tion d’un caïd qui pense décro­cher pour les beaux yeux d’une dame. Et ce sché­ma, c’est pré­ci­sé­ment celui d’un cer­tain Heat… La réfé­rence est d’au­tant plus incon­tour­nable que la réa­li­sa­tion rap­pelle for­te­ment la réfé­rence de Michael Mann.

Du coup, il aurait fal­lu un scé­na­rio aus­si char­pen­té que l’aî­né — avec un peu moins d’ac­tion et un peu plus d’é­qui­libre psy­cho­lo­gique, par exemple : la grande force de Heat, c’est qu’on ne suit pas seule­ment les inter­ro­ga­tions de McCauley, mais aus­si celles de Hanna, flic désa­bu­sé et soli­taire qui doit pour­tant être là pour sa belle-fille. Ici, le film est trop cen­tré sur McRay, dont on connaît les nom­breux doutes et les détails de l’é­vo­lu­tion, et les flics ne sont que flics. On est donc dans un entre-deux, trop psy­cho­lo­gique et tra­vaillé pour un simple film de bra­queurs, mais pas assez équi­li­bré pour deve­nir une réfé­rence du polar.

Ceci dit, comme sou­vent lorsque je me mets à com­pa­rer un film à un illustre aîné, la cri­tique paraît sévère tan­dis que l’œuvre reste excel­lente : ce sont deux heures bien employées, bien fichues et fort convain­cantes. C’est ce que j’ai vu de mieux avec Ben Affleck, et c’est vrai­ment conseillé aux ama­teurs de polar.